Si le maire de Montauroux, Jean-Yves Huet, dans le Var, a fini par lâcher le morceau, fin février, en annonçant la suspension des permis de construire pour cinq ans dans les villages du pays de Fayence, faute d’eau, avant qu’un document l’officialise, c’est pour ne pas voir des acheteurs potentiels engager des frais pour rien. Pour certains, il était déjà trop tard. Un jeune couple s’est vu refuser son permis alors qu’ils avaient dépensé quelques milliers d’euros en études et premières esquisses pour la maison qu’ils envisageaient de faire construire.
C’est au cours d’une réunion organisée à la maison de la régie de l’eau, à Fayence, le 31 janvier, que cette décision, une première en France pour une communauté de communes, s’est imposée. Autour de la table ce soir-là, neuf maires, le sous-préfet de Draguignan, Eric de Wispelaere, les représentants de l’agence de l’eau et de la direction départementale des territoires et de la mer. Le nez sur les courbes du débit de la Siagnole – la source qui alimente Fayence, mais aussi Draguignan, et une partie de Fréjus et Saint-Raphaël, sur la côte –, les hauteurs des deux forages, et les prévisions de consommation, ils ont convenu qu’il fallait tout arrêter net. Le délai de cinq ans reste une durée approximative, mais il s’agit du temps qu’ils estiment nécessaire pour retrouver de l’eau.
L’Etat soutient et les accompagnera en cas de recours devant les tribunaux. Le 10 mars, le préfet Evence Richard leur a adressé une lettre en ce sens, les invitant « à refuser les demandes d’autorisation d’urbanisme pour les projets qui génèrent une consommation d’eau ». D’autant, rappelle-t-il, que les communes sont chargées de fournir l’eau nécessaire à la lutte contre les feux de forêt. « Il vous appartient d’éviter ce risque en refusant toute nouvelle autorisation susceptible d’accroître la vulnérabilité et d’affaiblir les moyens de lutte. » Au vu des sols désespérément secs, le risque est déjà très élevé.
« Un côté foudroyant »
« Le dérèglement climatique, cela devient concret pour nous. Ce n’est pas qu’on ne l’a pas vu venir, mais il y a un côté foudroyant », avoue François Cavalier, le maire de Callian, un des neuf villages perchés. « Ce qui surprend, c’est la vitesse à laquelle le niveau de ressource baisse », décrit le sous-préfet. A la sortie de l’hiver, le niveau de la nappe était aussi bas qu’en juin 2022. Les deux forages d’appoint étaient inutilisables. Cet hiver, le département a enregistré 35 % de précipitations en moins par rapport à l’hiver précédent. Pour le seul mois de février, la pluviométrie a chuté de 84 %.
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